Design et héritage familial
Les étudiants du cursus Design réalisent un PFE, un Projet de Fin d’Études, afin de valider leur Mastère. Dans ce cadre, Henri Lanusse, étudiant de l’ECV Bordeaux en Mastère Design Graphique, a présenté « Mémoires Tissées », largement félicité par le jury et l’équipe pédagogique. Découvrez son expérience à l’école et le processus de réalisation de cet ambitieux projet.
Si tu devais décrire ton univers en cinq mots, ce seraient lesquels ?
Salut ! Henri Lanusse, 25 bougies, fraîchement diplômé de l’ECV Bordeaux, et plutôt du genre à aller droit au but. Mon univers créatif a beaucoup varié et s’est construit tout au long de mes études. J’ai commencé par des travaux hyper manuels, comme des croquis d’extérieur, j’ai exploré l’illustration à l’aquarelle, au feutre et au papier découpé. Par la suite, je me suis tourné vers l’illustration vectorielle sur tablette, ainsi que vers l’identité visuelle et la création de logos.
Je suis également passionné par la typographie et l’édition, j’apprécie le respect des grilles et des lignes, sans hésiter à les déconstruire pour explorer de nouvelles possibilités. Aujourd’hui, mon univers est un mélange de toutes ces expériences, et je suis conscient qu’il continuera d’évoluer avec le temps. J’ai dit bien plus que cinq mots, mais s’il fallait en choisir cinq, ce serait : exploration, flexibilité, émotion, café et encore café.
Un-e artiste qui t’inspire particulièrement en ce moment ?
Le compte Instagram @eyecanndy partage des extraits de clips et de vidéos d’artistes plus ou moins connus, ainsi que les idées de Pablo Rochat et les films de Jeanne Herry. En ce qui concerne les studios, j’apprécie la démarche d’Expérimental Jetset et j’ai découvert plus récemment l’Atelier Saint-Lazare, qui lie architecture, objets et identité.
Mais ma plus grosse inspiration reste les photos de Yann Lanusse sur son compte Instagram @yann5l.
As-tu toujours souhaité t’orienter vers des études de Design ?
Au départ, mon goût pour le sport et mes bonnes notes scolaires…m’ont conduit à une année de STAPS, même si j’avais initialement envisagé des études en architecture. Après cette année, j’ai commencé à m’interroger sur le design, d’abord de manière générale, avec l’envie de créer des solutions fonctionnelles et esthétiques.
Les portes ouvertes à l’ECV m’ont conforté dans l’idée que le graphisme était le bon choix pour moi. J’ai réalisé que c’était une façon de combiner mes compétences en communication et ma passion pour le dessin.
Comment se sont passées tes études à l’ECV Bordeaux ?
Mes études ont été une belle expérience. J’y ai passé cinq années enrichissantes, avec de nombreuses rencontres, tant avec les étudiants qu’avec les intervenants. L’ambiance positive de l’école est clairement due à des intervenants investis et passionnés. Quand on a la chance de tomber sur des intervenants avec qui le rapport devient un véritable jeu de ping-pong, au lieu d’une simple discussion stérile, c’est vraiment génial. Et en plus, les le locaux sont aussi.
Là aussi j’ai bien envie de dire 5 mots :
- Richesse,
- Rencontres,
- Opportunités,
- Evolution,
- Nuits blanches.
Un cours qui t’a particulièrement marqué ?
Un cours qui m’a particulièrement marqué est celui de typographie de Martin Lavielle. Je pense que la qualité des cours à l’ECV est en grande partie due aux intervenants, qui ont une vraie part de responsabilité dans ce que j’aime aujourd’hui et dans mon orientation vers le graphisme. Je pense aussi au cours d’identité d’Arnaud Lacoste et à celui de DA images de Yann Rabanier, qui m’ont vraiment inspiré. Et presque tous les cours de prépa étaient assez géniaux.
Peux-tu nous pitcher ton PFE et nous expliquer son importance personnelle ?
Pour mon projet de fin d’études, il m’a semblé naturel de poursuivre sur le thème que j’avais déjà abordé en Mastère 1 : les mémoires familiales et leur influence sur notre identité. Ce premier mémoire m’avait déjà poussé à explorer des projets personnels, comme une petite édition avec ma sœur, mais aussi à envisager ce projet plus ambitieux, celui de Mémoires Tissées.
Mémoires Tissées est un travail à la fois graphique et anthropologique, qui explore la vie de ma grand-mère à travers différents médiums graphiques. Ce projet est né de mon envie de redécouvrir qui elle est, d’aller au-delà de l’image de la grand-mère pour mieux comprendre la femme qu’elle était dans sa jeunesse. J’ai voulu en faire une collaboration réelle, passer du temps à ses côtés pour capter son histoire, mais aussi sa présence et sa personnalité. En plus d’être un travail de création graphique, d’édition, de typographie et d’anthropologie, Mémoires Tissées est devenu pour moi une véritable expérience humaine, marquée par une évolution personnelle.
Dans ton PFE, tu lies le design aux émotions, à la transmission, c’était important pour toi ?
Oui, lier le design aux émotions et à la transmission était essentiel pour moi. Le design, au-delà de sa fonction esthétique, a le pouvoir d’évoquer des souvenirs, de déclencher des émotions, de tisser des liens. Dans Mémoires Tissées, chaque élément graphique porte une part de l’histoire de ma grand-mère, de notre relation, et invite les autres à percevoir un fragment de sa vie. Le design devient un langage, un moyen de capturer l’intangible et de rendre le passé présent.
Cela peut avoir un impact fort : en apportant une dimension émotionnelle au design, on engage les gens, on suscite leur intérêt, leur empathie. C’est pour moi un aspect important, mais pas toujours nécessaire. Parfois, un design peut simplement être fonctionnel, mais quand il porte en lui une histoire, il gagne en profondeur et en sensibilité, offrant une expérience plus humaine et authentique.
Peux-tu nous parler des challenges auxquels tu as été confronté dans la réalisation de ton PFE ?
Le premier challenge a été d’expliquer à ma grand-mère de 92 ans pourquoi je voulais raconter sa vie pour mon projet de fin d’études, et surtout pourquoi cela pourrait intéresser les gens. Elle avait du mal à saisir cette démarche, et il m’a fallu trouver les mots pour lui montrer en quoi sa vie pouvait devenir un témoignage universel et touchant.
Ensuite, le vrai défi a été de déterminer un axe de travail : comment raconter tout ce que j’allais découvrir ? Devais-je me placer comme un graphiste, un petit-fils ou un anthropologue ? Et à qui m’adresser ? Une fois cet axe trouvé, le plus long a été de rassembler toutes les informations : des enregistrements, des photos, des objets… c’était un travail d’archivage conséquent. Heureusement, ma grand-mère a complètement joué le jeu en participant à presque chaque étape. Que ce soit pour créer ensemble une typographie, pour raconter des histoires sur les objets de sa maison, ou pour donner des commentaires sur les textes qu’elle avait écrits.
Jusqu’à la fin, il y a eu des imprévus, et j’ai dû constamment m’adapter, mais c’est aussi ce qui a rendu l’expérience unique. Finalement, à partir du moment où j’ai commencé à prendre du plaisir à chaque étape, tout s’est déroulé plus naturellement.
Ce projet m’a apporté à la fois sur le plan personnel et professionnel. Collaborer avec ma grand-mère m’a appris à écouter différemment, à aller chercher la nuance dans les souvenirs, et surtout à prendre le temps nécessaire pour chaque étape. Il m’a montré l’importance du travail en équipe. Même sans connaître le graphisme, ma grand-mère a apporté des éléments uniques qui ont rendu le projet vivant et authentique.
Et plus légèrement, j’ai aussi découvert plein de petites anecdotes familiales. Maintenant, j’ai un stock parfait pour les repas de famille !
Qu’est-ce que tu dirais à quelqu’un qui souhaiterait aller vers des études de design ?
Je dirais de bien se renseigner sur les différentes écoles, d’aller rencontrer des élèves actuels ou des anciens pour avoir une vraie vision de chaque parcours. D’être curieux, observateur, et d’apprendre à se nourrir plus de ce qui t’entoure que de sandwichs triangles.
Quels sont tes projets à court terme ou tes recherches professionnelles ?
Aujourd’hui, j’ai trouvé un équilibre entre édition, typographie, identité visuelle et illustration. Je structure mon activité personnelle tout en restant ouvert aux opportunités pour un poste fixe. Je serais ravi d’échanger sur de nouvelles possibilités.
Un petit mot pour la fin ?
Je suis ravi de conclure mes études par cette interview, cela me donne l’impression d’avoir bouclé la boucle. Merci à ceux qui m’ont offert l’opportunité de partager mes réflexions. Si cet article suscite des questions ou des échanges, n’hésitez pas à me contacter. Je suis toujours ouvert à discuter !