[INTERVIEW] Au coeur de la scénographie du TDC 65
Depuis 1946, le Type Directors Club (TDC), basé à New York, promeut la typographie et le design graphique en organisant une exposition itinérante, résultat d’une compétition internationale. L’ECV en est le représentant officiel en France et accueille chaque édition. À Nantes, c’est en partenariat avec l’École Nationale d’Architecture de Nantes (ENSA) que l’ECV met en place cet événement au sein de la Galerie Loire.
Chaque année, cet événement est également pour les étudiant.e.s de Mastère 1 Graphic Design de l’ECV Nantes l’occasion de travailler sur un projet concret et professionnalisant : celui de la scénographie de l’exposition. Après avoir défendu leur projet en groupe devant un jury, c’est la proposition de Morgan Texier, Peio Ospital et Teddy Pouteau qui a été retenue et mise en place pour la 65ème édition de l’exposition.
Cette équipe de choc s’est prêtée au jeu de l’interview et revient sur cette belle expérience. Encore félicitations à eux !
Quel est l’objectif initial d’un projet comme celui-ci ?
T/ Un projet comme celui-ci permet aux étudiants d’avoir une approche professionnalisante : de la phase d’argumentation du projet devant un jury jusqu’à sa réalisation, en passant par l’adaptation aux problèmes techniques et budgétaires.
P/ Ce projet est aussi, selon moi, porté par une grande motivation et un investissement de tous les étudiants, sachant que c’est un projet réel, avec de vrais enjeux et que la plupart l’attendent depuis des années.
M/ Je pense qu’un projet de cet envergure sert avant tout à challenger les élèves. Au bout de trois années consécutives durant lesquelles l’ECV nous amène à visiter cette exposition, nous sommes nombreux en M1 (l’année où les étudiants sont sollicités pour participer au projet) à être impatients de proposer notre propre vision de l’exposition. Au delà de ça, cela nous permet d’effectuer un projet de A à Z, de la conception à la pose sur le lieu, en prenant compte des matériaux, du coût de réalisation, ou encore des imprévus.
Comment s’est déroulée la conception de votre projet ?
M/ Nous nous sommes d’abord rendus sur le lieu, à savoir la Galerie Loire, afin de mieux prendre en considération les dimensions, les avantages et les contraintes du lieu. Comme cette année est là 65e édition, nous avions également un précieux retour des années précédentes, avec ce qui fonctionnait ou pas en terme de visibilité et de lisibilité. Une fois que nous avons accumulé ces informations cruciales pour le bon déroulement du projet, nous nous sommes amusés à jouer avec les contraintes de la façade, notamment avec cette imposante armature et ses grandes baies vitrées.
T/ L’expérience que nous avons acquise, après avoir vu l’exposition depuis maintenant 4 ans nous a bien servie. Nous avons dû présenter ce projet devant un jury afin de présenter notre concept et notre création. Ensuite, quand le projet a été choisi, nous sommes passés à la phase réalisation. Pendant cette phase nous avons pu échanger et avoir le retour d’intervenants afin de nous aider à mener ce projet jusqu’à son terme.
Quel a été votre rôle respectif ?
T/ En nous basant sur nos qualités respectives, nous nous sommes répartis les différents supports tout en restant à l’écoute les uns des autres : Morgan les éléments animés, numériques et sonores, Peio les supports imprimés et moi, la signalétique. Évidemment, chacun a participé à la conception de chaque support, nous nous sommes bien complétés.
M/ Au départ, nous nous sommes tous attelés au concept, à part égale. Nous considérions toutes les idées, avons fait de multiples tests jusqu’à développer la piste de l’aéroport. Une fois notre choix défini en terme de direction artistique, nous avons divisé la conception des différentes déclinaisons en fonction des qualités de chacun.
En quoi consiste votre scénographie ? Pouvez-vous nous expliquer le concept de votre création visuelle ?
Constituée en grande partie de baies vitrées et d’une architecture minimaliste, la Galerie Loire nous a rapidement évoqué un aéroport. Le TDC étant une exposition itinérante de designers du monde entier, toutes langues et origines confondues, cette idée d’aéroport nous semblait couler de source. En nous servant de l’armature présente sur la façade, qui nous rappelle également les cases de typographie présentes dans les débuts de l’imprimerie, nous créons un parallèle avec la signalétique présente dans les aéroports, avec des indications claires et précises afin de guider les passants, notamment à travers ces panneaux d’affichage à volets mobiles. Pour le choix des couleurs, nous avons sélectionné le blanc, le noir et le jaune par soucis de contraste, mais aussi car ce sont des couleurs qui reviennent souvent à travers la signalétique des aéroports.
Le petit plus de notre concept, est que nous venons ponctuer la typographie que nous utilisons (à savoir la Input Mono par David Jonathan Ross) par des caractères empruntés à d’autres alphabets comme le Japonais, l’Hindi, le Cyrillique ou l’Arabe. Nous avons sélectionné ces signes pour leur ressemblance à certaines lettres de l’alphabet Latin, pour que la signalétique soit lisible. Ces derniers sont remarquables par leur couleur jaune.
Que retirez-vous de cette expérience à titre personnel et professionnel ?
P/ Étant donné que ce projet était le premier réalisé à échelle 1, ce fut une expérience vraiment passionnante et enrichissante. Savoir s’adapter aux contraintes techniques et budgétaires est un réel exercice.
M/ C’est un projet très prenant et très intéressant à réaliser. Il nous implique directement dans la production et la mise en forme du projet, mais aussi en nous apprenant à dialoguer avec les imprimeurs et à prendre des responsabilités… Notamment parce qu’il y a un gros enjeu et des contraintes budgétaires.
T/ Je retiens surtout que les concepts que nous imaginons doivent être pensés avec les contraintes réelles. Il faut donc savoir s’adapter et être réactif !
Auriez-vous un conseil à donner aux prochain.e.s étudiant.e.s qui seront amené.e.s à travailler sur la scénographie du TDC dans les années à venir ?
M/ Lâchez-vous, éclatez-vous un maximum, mais gardez en tête que votre projet peut-être repensé pour être réalisable ! Ne vous y prenez pas au dernier moment pour les fichiers d’exécution, car le temps donné pour réaliser ce projet est déjà assez short. Bon courage, vous êtes les meilleurs !
P/ Renseignez vous assez rapidement sur les matériaux possibles d’usage, pour ne pas imaginer un projet irréalisable. Mais n’oubliez pas de vous amuser quand même. 😉